Rêveries et charmes d’un savoir pas encore raisonnable
En cette période qu’à tort ou à raison on a appelée baroque, la pensée cesse de se mouvoir dans l’élément de la ressemblance. La similitude [...] est l’occasion de l’erreur, le danger auquel on s’expose quand on n’examine pas le lieu mal éclairé des confusions. [...] L’âge du semblable [est celui] des jeux. Des jeux dont les pouvoirs d’enchantement croissent de cette parenté nouvelle de la ressemblance et de l’illusion ; partout se dessinent les chimères de la similitude, mais on sait que ce sont des chimères ; c’est le temps privilégié du trompe-l’œil, de l’illusion comique, du théâtre qui se dédouble et représente un théâtre, du quiproquo, des songes et visions ; c’est le temps des sens trompeurs ; c’est le temps où les métaphores, les comparaisons et les allégories définissent l’espace poétique du langage [...] où toutes les choses du monde pouvaient se rapprocher au hasard des expériences, des traditions ou des crédulités.
Michel Foucault, Les mots et les choses, 3,2
Publié le 16 avril 2017