Ève Lomé

Journal extime

Mettre le cap sur Anticyre

Mettre le cap sur Anticyre

Mettre le cap sur Anticyre porte en elle des effluves d’hellébore, cette fleur dont les anciens pensaient qu’elle pouvait guérir la folie et qui se cultivait dans le petit village d’Anticyre en Grèce centrale. Mettre le cap sur Anticyre c’est donc naviguer en eaux troubles sur la Nef des fous¹, certes, mais vers la guérison qui s’obtiendra grâce à la senteur d’une rose de Noël.

Un parfum pour guérir, voilà ce que suggère mettre le cap sur Anticyre. Une belle idée de la folie qui s’apaiserait dès qu’on le lui demande avec des fleurs, à condition que ce soit des hellébores et qu’on respecte la posologie.

Coup de folie : une cuiller à soupe
Quart d’heure de folie : deux à trois gouttes.
Folies Bergères : sans objet.
Folie des grandeurs : deux cuillères à café, matin midi et soir. Renouveler le traitement jusqu’à dégonflement total de l’occiput.
Folie amoureuse : une dose par semaine à diluer dans de l’eau fraîche.
Folie meurtrière : deux doses.
NE PAS UTILISER EN CAS DE FOLIE DOUCE.

Lors de la troisième guerre sacrée, ce va-t-en-guerre de Philippe II de Macédoine marche sur Anticyre et détruit la ville et ses champs d’hellébore. C’est non seulement la fin de l’expression (vers -355 environ, d’où la probabilité importante que vous ne l’ayez point entendue si ce n’est par Ronsard dans le Discours à la Reine) mais aussi et surtout le début d’une folie inguérissable qui s’empare du monde.

www.mots-surannes.fr

Publié le 19 avril 2025

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