Trois pelés et un tondu
« - J’avais dit, »pendant les vacances, je ne fais rien !... rien !... je ne veux rien faire". Je ne savais pas où aller.
Comme j’avais entendu dire : « A quand les vacances ?... A quand les vacances ?... » Je me dis : « Bon !... je vais aller à Caen... Et puis à Caen !... ça tombait bien, je n’avais rien à y faire. » Je boucle la valise.
.. Je vais pour prendre le car... je demande à l’employé :
– Pour Caen, quelle heure ?
– Pour où ?
– Pour Caen !
– Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne sais pas où ?
– Comment ? Vous ne savez pas où est Caen ?
– Si vous ne me le dites pas !
– Mais je vous ai dit Caen !
– Oui !... mais vous ne m’avez pas dit où !
– Monsieur... je vous demande une petite minute d’attention ! Je voudrais que vous me donniez l’heure
des départs des cars qui partent pour Caen !
– !!...
– Enfin !... Caen !... dans le Calvados !...
– C’est vague !
– ... En Normandie !...
– !!...
– Ma parole ! Vous débarquez !
– Ah !... là où a eu lieu le débarquement !... En Normandie. A Caen...
– Là !
– Prenez le car.
– Il part quand ?
– Il part au quart.
– !!... Mais ( regardant sa montre )... le quart est passé !
– Ah ! Si le car est passé, vous l’avez raté.
– !!... Alors... et le prochain ?
– Il part à Sète.
– Mais il va à Caen ?
– Non il va à Sète.
– !!... Mais, moi, je ne veux pas aller à Sète... Je veux aller à Caen !
– D’abord, qu’est-ce que vous allez faire à Caen ?
– Rien !... Rien !... Je n’ai rien à y faire !
– Alors si vous n’avez rien à faire à Caen, allez à Sète.
– !!... Qu’est-ce que vous voulez que j’aille faire à Sète ?
– Prendre le car !
– Pour où ?
– Pour Caen.
– Comment voulez-vous que je vous dise quand, si je ne sais pas où !...
– Comment !... Vous ne savez pas où est Caen ?
– Mais si je sais où est Caen !... ça fait une demi-heure que je vous dis que c’est dans le Calvados !
... Que c’est là où je veux passer mes vacances, parce que je n’ai rien à y faire !
– Ne criez pas !... Ne criez pas !... On va s’occuper de vous.
Il a téléphoné au Dépôt.
Mon vieux !... ( regardant sa montre ) :
A vingt-deux, le car était là.
Les flics m’ont embarqué à sept...
Et je suis arrivé au quart.
Où j’ai passé la nuit !"
Raymond Devos
Averel se délecte de persil géant
Publié le 30 novembre 2020
