C’est dans l’air
Trouver le difficile équilibre entre protection sanitaire et société sécuritaire, force à questionner nos valeurs, et, au-delà, leur mise en œuvre au sein de l’État de droit. Quel rôle peut, et se doit tenir le droit dans nos sociétés démocratiques ?
Devant l’acte terroriste, le droit peut apparaître insuffisant, en retard. Pourtant tous deux inscrivent l’action dans des temporalités distinctes qu’il est dangereux de vouloir superposer : répondre à la violence par une nouvelle norme n’est que le signe de l’impuissance de la norme, et pourrait à terme mettre en cause l’État de droit.
Le droit doit demeurer le garant de l’État de droit. Face aux « vents contraires », intérêts contradictoires inhérents à la mondialisation et que chaque crise souligne, le droit doit déployer un triptyque essentiel : résister, responsabiliser, anticiper. Fil rouge de sa réflexion : construire autour d’une appartenance commune, ne pas céder à une gouvernance par la peur, menace pour l’État de droit, porte ouverte à un « despotisme doux », contrôle total et invisible des citoyens déjà dénoncé par Tocqueville. Pour cela, il faut alors résister à la tentation de faire taire la démocratie au nom de sa préservation même, comme l’a rappelé la Cour Européenne des droits de l’Homme.
« Le tout contrôle assurerait certes la survie de l’espèce, mais peut-être pas de l’humanité au sens moral et éthique du terme. »
Interview, Mireille Delmas-Marty
Publié le 28 mars 2018